Juste brillant, brillant de justesse, d’imagination et de cœur.
BerbiquĂ est Ă l’initiative d’un projet inclusif, touchant, innovant et basĂ© sur l’art, avec pour conviction que l’art est universel et que chacun de nous avec ses capacitĂ©s est un artiste. Le nom de ce projet europĂ©en est « Dibujando nuestras voces » c’est-Ă -dire en traduction littĂ©rale, « en dessinant nos voix » ou encore « drawing our voices ». Co-Actions, coopĂ©rative d’entrepreneurs basĂ©e en Nouvelle-Aquitaine, a permis le montage de ce projet europĂ©en. BerbiquĂ est un projet qui permet la mixitĂ© de jeunes adolescents et de jeunes adultes neuro typiques. Parmi eux des jeunes avec trisomie 21. Tous, ils dessinent ensemble et ces dessins sont imprimĂ©s sur diffĂ©rents produits comme des chaussettes, sacs et tee-shirts. Ils crĂ©ent Ă©galement des vidĂ©os de sensibilisation, dont une qui a reçu un prix et qui est inspirĂ©e du film AmĂ©lie Poulain.
Promouvoir l’idĂ©e que tout le monde est un artiste et que les personnes avec handicap peuvent elles-aussi vivre de leur travail artistique, « yo soy un Artista » est au cĹ“ur de ces projets inclusifs. Dans le cadre de ce projet europĂ©en, Ludosens a pris sa place au mĂŞme titre qu’une Ă©cole inclusive portugaise basĂ©e Ă Porto, El Agrupamento Escolas de Vilela de Portugal et nous sommes partis Ă 7 vivre un Ă©change interculturel entre jeunes dans la très jolie ville de Burgos pendant cinq jours. L’école d’art et de design de Burgos est Ă©galement impliquĂ©e.
Plusieurs ateliers artistiques se sont dĂ©roulĂ©s autour du dessin sur des matières variĂ©es (toile cirĂ©e, textile pour fabriquer une cape…), dans l’optique de prĂ©parer le dĂ©filĂ© de mode, point d’orgue de la semaine. Ce dĂ©filĂ© de mode a lieu au MusĂ©e de l’Évolution Humaine et met en valeur les personnes dans toute leur diversitĂ© dans des tenues vestimentaires créées avec les contributions de chacun. Le tout est juste brillant, brillant de justesse, d’imagination et de cĹ“ur.
Ce défilé dans un musée vouée à l’évolution nous paraît particulièrement touchant et à propos.
La véritable évolution se situe précisément là , dans cette diversité qui défile, l’aboutissement de toute cette chaîne d’évolution humaine c’est cette diversité de visages, de particularités de fonctionnement, de manières de se mouvoir. C’est la mise à l’honneur de ces personnes qui défilent en vedettes et dans la joie de parader, célébrant la diversité des couleurs, des matières, la vraie évolution se situe dans la rencontre entre des jeunes de trois nationalités européennes, beaux et touchants, venant cueillir le meilleur de notre cœur.
Pour rappel, depuis 2018, Ludosens développe des projets interculturels qui ont vocation à faciliter l’accès à l’international pour des jeunes issus de la neurodiversité.
Priscilla Laulan

Cette année, nous sommes sept à vivre cette aventure, dont deux accompagnatrices, et chacun d’entre nous a un ressenti unique sur ce voyage et ses propres expériences en amont.
Nous voulions témoigner de manière individuelle sur notre vécu au quotidien de ce voyage inter-culturel, mais également de notre point de vue sur l’accessibilité des voyages pour nous, jeunes neuro-atypiques. Est-ce si facile de vivre du volontariat à l’international ? Est-il si facile de voyager quand on est neuro-atypique ?
Eric :
Je suis ravi d’être parti en voyage avec vous, Ludosens. Je me retrouve en vous et de manière différente mais aussi plus proche de mon identité que des personnes sur Lourdes où je vis, qui ont un handicap psychique. Je me sens bien plus ouvert à votre contact. J’apprends à me gérer et à vivre le groupe, chacun dans sa particularité.
Je trouve les espagnols très ouverts, sympathiques et très respectueux, polis, que ce soit les partenaires associatifs de Ludosens ou dans les magasins. J’apprécie l’emploi du temps qui est aéré et me permet de me sentir bien. J’apprends un peu plus aujourd’hui que chaque personne a son identité sacrée et son parcours. On a tous à s’apporter. Je suis fier d’être et d’avoir été votre Président associatif. J’ai beaucoup aimé l’atelier artistique sur panneau plastique avec les dessins de Berbiqui imprimés. J’aime la mixité d’âges parmi nous et parmi les espagnols. Vous m’apprenez à accueillir l’autre sans jugement hâtif ou analyse.
J’ai 52 ans et je recommence à vivre sans chaînes du passé.
Je suis comme je suis et aspire à me développer avec tous mes talents. Je désire me défaire de mes préjugés culturels. J’aspire à la paix, au lâcher prise, à une meilleure confiance en moi, à une juste affirmation de moi…Vive la vie ! Les voyages…
Kay :
Ce voyage est une véritable opportunité pour moi qui n’ai jamais pu avoir la chance de partir à l’étranger auparavant. J’en suis très enthousiaste, ravi·e de découvrir des choses, d’expérimenter mon espagnol, de vivre des expériences humaines, des rencontres. C’est aussi très touchant de pouvoir constater qu’il a d’autres associations avec la même philosophie que Ludosens dans le monde. A cela, je rajouterai qu’il y a cette énergie bienveillante qui règne à travers la patience, le respect de chacun et du partage.
En outre, en tant que personne lié·e à l’art, pouvoir l’expérimenter d’une nouvelle manière est très enrichissant. D’autant qu’à travers ces ateliers artistiques, je crée des liens avec d’autres personnes, avec un feeling plus ou moins fort, mais toujours authentique, unique et qui réchauffe le cœur.
En tant que personne neuroatypique, je n’ai jusqu’ici pas eu la chance de partir à l’étranger et n’aurait probablement pas pu le faire de moi-même. Car les problèmes qui peuvent se poser pour ce genre d’aventure, c’est le besoin d’une organisation en béton pour pallier à nos angoisses, nos besoins, nos habitudes, notre sensorialité. Et paradoxalement, il nous est extrêmement compliqué de créer une telle organisation, ce cadre dont on a tant besoin. Pour certains, s’éloigner de la familiarité du quotidien et de notre habitat sera déjà une tâche presque insurmontable.

Colin :
Partir Ă l’étranger n’a pas toujours Ă©tĂ© une tâche facile. Ayant l’habitude d’ĂŞtre canalisĂ© par une certaine routine, partir loin de ma zone de confort est source de beaucoup d’anticipation et de stress. Je ne peux pas m’empĂŞcher de surestimer la fatigue que je vais ressentir et dès lors un premier frein apparait, pourquoi partir Ă l’aventure si c’est pour ne pas en profiter et ressentir de la frustration ? Si je n’arrive pas Ă faire ce que je prĂ©vois lorsque je suis chez moi, j’ai tendance Ă partir du principe que cela sera pire Ă l’étranger.
À ça s’ajoute le fait de devoir prendre plusieurs décisions : le choix de la destination, quand partir, comment partir ? Que faire sur place ? Partir seul ou accompagné ? Organiser un voyage demande un certain lâcher prise. Encore une fois j’ai tendance à trop anticiper l’exposition de mes sens à de nouvelles sources inconnues.
De plus, la barrière de la langue m’empĂŞche de comprendre mon entourage et devient source de stress. Est-ce que je dĂ©range ? Est-ce que je me fais arnaquer ? Les sourires sont-ils sincères ? Ainsi, il est beaucoup plus facile pour moi de me lancer dans un projet de voyage lorsque je ne suis pas responsable de l’organisation.
Ce dont j’ai besoin c’est d’un juste équilibre. J’aime qu’il y ait une organisation où je suis guidé et où j’ai juste à me laisser aller, mais sans sentir non plus qu’on m’impose quoi que ce soit.
Nicolas :
En tant que neuroatypique, j’Ă©tais un peu fatiguĂ© durant le trajet. J’aime le travail d’équipe et je me plais dans le groupe. Le voyage que je vis actuellement est superbe, Ă la rencontre de nouvelles personnes pleines de gentillesse. Je me sens bien accueilli. Je me sens enthousiaste de partir Ă la dĂ©couverte d’un nouveau pays et j’aimerais pouvoir rester plus longtemps. J’ai des difficultĂ©s Ă parler espagnol, mais je suis content que Sandra traduise. J’aime dĂ©couvrir le monde. Je ne me voyais pas voyager Ă l’étranger tout seul parce qu’il me faut un temps d’adaptation.
Les rencontres que j’ai faites sont fabuleuses. Ces personnes sont toutes douées en dessin, peinture, couture. Ce qu’ils font, ces ateliers mettant en valeur les talents artistiques, ça ouvre les yeux et apporte une grande et très forte émotion, ça apporte de la joie.
Sam :
Je suis très content de faire ce voyage. Je voyage assez souvent et j’ai toujours le mal du pays le premier soir. Une fois ça passé, je peux profiter ! J’adore rencontrer des personnes dans ce contexte, en général les discussions sont légères et détendues, parce qu’il n’y a pas d’autre objectif que de se découvrir et de passer un bon moment. En plus, le fait de voyager avec Ludosens me permet d’aller dans un pays dont je ne parle pas la langue, et de ne pas avoir à me soucier de l’organisation !
En tant que personne neuroatypique, le plus compliquĂ© dans un voyage, c’est de gĂ©rer l’organisation. Il y a beaucoup de paramètres Ă prendre en compte ce qui rend difficile la prise de dĂ©cision. Le fait de devoir gĂ©rer cette organisation tout en subissant des environnements souvent bruyants (restaurants, lieux touristiques,…) peut gĂ©nĂ©rer chez moi de l’angoisse voire des crises de panique.
