Aller au contenu

Les neuroatypiques au royaume des normes et des étiquettes

Sur certains points, la société n’a pas beaucoup évolué concernant les neuroatypiques. 

Elle est régie par de nombreuses normes plus ou moins tacites, de nombreuses règles à connaître et à respecter pour « réussir » sa vie et être bien vu. Quand on est une personne atypique, on a du mal à assimiler toutes ces normes, et à s’y adapter, principalement à cause de manières différentes de réfléchir et de communiquer. La société a même un poids tellement lourd qu’elle peut nous faire culpabiliser de ne pas réussir à entrer dans ces normes.

Un exemple me vient directement en tête, car j’y ai été souvent confronté, ce sont les entretiens d’embauche. Je pense que beaucoup de personnes neuroatypiques vous diront que c’est quelque chose de particulièrement désagréable et stressant. Beaucoup de paramètres sont à prendre en compte, et beaucoup de règles implicites sont à respecter pour avoir une chance d’être pris. Dans ce cas précis, il faut tout simplement se donner en spectacle. Les mots sont à choisir précautionneusement, le langage non-verbal doit être parfait.

Comme nous l’avions évoqué dans l’article sur la forme d’autisme appelé communément « Asperger », il est très facile pour la société de mettre les personnes neuroatypiques dans des cases. Comme certaines d’entre elles ne s’adaptent pas facilement, on fait croire au public qu’elles souffrent à cause de leurs troubles, qu’elles ont une intelligence inférieure. Ce dont elles souffrent en réalité, c’est bien de cette espèce d’ostracisme qu’on leur fait subir, des thérapies ridicules ou des lourds traitements médicamenteux sensés les guérir, et non pas de leurs troubles en eux-mêmes.

Cessons de croire que des molécules altérant l’équilibre chimique du cerveau vont faire des miracles sur les neuroatypiques. Certains spécialistes ont deviné depuis longtemps que ces enfants ne souffraient pas directement de leurs troubles, ils savent vivre avec. La vision de l’autisme, en France notamment, est encore obsolète, mais si vous suivez le blog, vous devriez le savoir (cf. le documentaire Le Mur).

Il serait bénéfique pour tout le monde de s’informer sur les troubles du spectre autistique, par exemple, de les accepter, sachant qu’en France, selon l’INSERM, 1 enfant sur 100 naît avec.

Cette catégorisation que nous évoquions est même devenue tellement inconsciente pour beaucoup, qu’elle en vient parfois à fausser la perception d’un interlocuteur, se basant sur des critères arbitraires. Certains voient des signes étranges quand il n’y en a pas (et l’inverse est même tout à fait probable, certains, j’en suis sûr, sont bernés en rencontrant des personnes dont le handicap est vraiment invisible).

Outre les personnes avec autisme qui ne représentent qu’une partie de tout ce que nous appelons la neurodiversité, bien d’autres personnes sont concernées par cet écart avec les normes dû à leurs spécificités. et elles ne le vivent pas forcément mal. J’aimerais évoquer les personnes à « haut potentiel« . Ces personnes, qu’on appellent également « zèbres« , sont souvent confrontées très tôt à un éloignement social. Souvent hypersensibles, elles peuvent intérioriser tous leurs ressentis et développer l’introspection et une intelligence intra-personnelle. Cela crée aussi souvent de la distance avec leurs camarades, à l’école, par exemple. Les moqueries, les brimades, et le rejet, c’est bien évidemment quelque chose que les neuroatypiques vivent souvent. Mais pas toujours. Certains ont une relative aisance à s’intégrer.

Personnellement, je suis particulièrement concerné par tout cela. Il faut dire qu’un certain nombre d’éléments dans ma vie m’ont laissé penser que j’étais peut-être une personne à haut potentiel. J’ai grandi en me forgeant certaines idées, notamment celles que j’étais une sorte d’ « alien », restant souvent dans ma bulle, tout en essayant tant bien que mal d’adopter un comportement social normal. Mais mes centres d’intérêt, souvent excentriques, ont renforcé ce sentiment de détachement par rapport à mon entourage, ou à des personnes de mon âge. Plusieurs signes dans ma personnalité, dans mes centres d’intérêt, et dans mon histoire personnelle peuvent donc évoquer la douance. Mais je n’irais pas faire de test.

J’ai finalement décidé de refuser toute étiquette. J’estime que cela a tellement peu d’importance dans ma vie. Au cours de mes réflexions pendant ma mission, j’en suis même plusieurs fois venu à me demander si cette division entre « NA » et « NT » n’était pas un peu floue, voire caricaturale. Cela dépend de l’utilisation qu’on fait du mot « neuroatypique ». Parfois on constate que le mot est utilisé entre personnes avec autisme pour désigner des personnes non-autistes. Cela me paraît donc bien réducteur.

Accepter le concept de neurodiversité, c’est aussi accepter que l’on est tous uniques, c’est s’accepter soi-même, ainsi que nos difficultés personnelles devant telle ou telle situation.

Alors, si l’on pouvait juste se baser sur d’autres critères pendant une phase de recrutement, ce serait parfait…

Ludosens, a justement pour ambition de faire reconnaître et accepter les jeunes neuroatypiques pour leurs qualités, leurs expériences de vie malgré leurs difficultés, de les faire s’épanouir dans une société qui les ignorerait presque alors qu’ils ont besoin, comme n’importe qui, de vivre, de « gagner leur croûte ». Passer outre ces barrières sociales, s’il n’est pas possible de les détruire complètement, c’est bien un enjeu de taille !

Benjamin M. – Rédacteur pour les Créatypiques

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Aller au contenu principal