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L’accès à la mobilité internationale, quels freins pour les jeunes au handicap invisible ?

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Homme à l'aéroport

A l’occasion de notre départ au Québec, nous voulions vous parler de l’accès à l’international, aux voyages (et même aux voyages engagés), en lien avec la citoyenneté, pour les jeunes neuroatypiques qui ont un handicap invisible…

En clair, nous nous demandons si les jeunes présentant un handicap invisible (TSA, DYS, TDAH, HPI, etc.) ont autant de chances que les autres jeunes de leur âge de vivre des expériences à l’étranger ?

Car l’expérience à l’étranger pour les jeunes d’aujourd’hui, que ce soit sous forme de stage, de volontariat, de première expérience professionnelle, d’échange étudiant, c’est un peu comme le permis de conduire ou le bac, un rite de passage vers l’âge adulte… C’est une expérience d’une grande richesse qui donne accès à l’échange interculturel, à l’ouverture sur le monde, sur d’autres jeunes vivant dans d’autres pays…

Aujourd’hui, bien des dispositifs existent pour faciliter l’engagement citoyen à l’étranger, la mobilité internationale de manière générale, quels que soient les revenus. Toutefois, il faut reconnaître que le voyage à l’international, même s’il tend à se démocratiser, garde une dimension assez élitiste : il peut souvent être réservé à des jeunes qui font des études supérieures, parce que, concrètement, ils sont encouragés tout au long de ces études à oser ce mouvement vers l’extérieur et peuvent saisir des opportunités qu’ils se voient proposer (ERASMUS, etc.)

J’ai également pu constater, à travers les recherches, que les jeunes ayant un handicap moteur sont quand même davantage favorisés dans leur accès à l’international. Un certain nombre de dispositifs facilitateurs existent par exemple, ils peuvent recevoir des bourses quand ils sont étudiants. Tandis que les personnes neuroatypiques ne sont jamais mentionnées.

Oui, mais pour nous, jeunes neuroatypiques, qu’en est-il ? Il est évident que ce n’est pas la même réalité.

Déjà parce que nous avons beaucoup plus de difficultés à atteindre des cursus élevés. Ensuite, puisque nous avons des besoins à prendre en considération.

Quels besoins spécifiques avons-nous pour un voyage réussi ?

En priorité, nous aurons fréquemment besoin d’être accompagnés et rassurés dans les démarches, dans la recherche d’informations à propos du pays que nous souhaitons visiter et des conditions d’accessibilité, et enfin pendant le voyage. Nous aurons également souvent besoin de l’avis d’un médecin.

Pour partir à l’étranger dans le cadre d’un volontariat, il faut généralement se tourner vers des structures et faire des démarches très spécifiques pour être aidé/accompagné. Les jeunes adultes en situation de handicap ne connaissent pas toujours ces démarches compliquées.

Beaucoup de barrières, donc…

… Mais le jeune neuroatypique s’en crée peut-être tout autant intérieurement, ce qui le renferme et l’isole un peu plus. J’ai moi-même rencontré un frein personnel lorsqu’il m’a été proposé de m’envoler pour le Québec, j’ai ressenti une forte appréhension face aux démarches à réaliser globalement (la démarche administrative de commande du passeport, entre autres…)

Il faut savoir que ce n’est pas toujours facile pour une personne neuroatypique, au niveau du ressenti intérieur, de voyager. En effet, la fatigue est plus importante lors d’un trajet. Il y aura la difficulté d’adaptation par rapport à la routine qui sera forcément brisée. Et un environnement nouveau joue sur l’appréhension au niveau de la compréhension verbale ou non avec les habitants du pays. Enfin, les importantes difficultés de séjourner dans des très grands espaces urbains sont réelles pour des personnes avec hypersensibilité sensorielle (visuelle, auditive…), etc.

Des voyages organisés en groupe, comme celui de Ludosens cette année, ou en famille, peuvent être déjà plus rassurants, permettent à un jeune neuroatypique d’exprimer rapidement les difficultés qu’il rencontre. Ensuite, il ne faut pas se dire que le voyage se passera forcément mal. C’est certain qu’un jeune neuroatypique devra quitter sa routine confortable, mais c’est un mal pour un bien, car il pourra faire face à de nouvelles situations qu’il apprendra à apprivoiser, de nouvelles expériences enrichissantes.

Le voyage peut même avoir une dimension libératrice pour certains, dû à la sensation d’étouffement, la pression sociale, qu’ils peuvent ressentir. C’est le cas de Josef Schovanec, dont vous nous verrez souvent parler ici. Encore une fois, il est inspirant, dans sa façon d’aborder le voyage. Il a notamment su contrer les sensations d’inconfort liées aux longs déplacements en prenant des petites habitudes étonnantes, comme apprendre le règlement des chemins de fer locaux !

Le voyage lui permet de se sentir libre. Libre d’aller où bon lui semble, mais aussi, libre d’être lui-même, et même de se dépasser, de se libérer de sa « coquille » sociale. En effet, les codes sociaux sont différents suivant les pays. Alors, les personnes avec un handicap invisible, handicap qui ne se voit pas du premier abord, peuvent se sentir débarrassées de leur étiquette habituelle, plus à l’aise d’évoluer dans un environnement dans lequel leurs spécificités passeront inaperçues. Joseph Schovanec a voulu témoigner de cette dimension libératrice propre au voyage : Il a pu se sentir plus libre d’être lui-même, à l’extérieur comme à l’intérieur. Un confort inédit.

C’est d’ailleurs une sensation que connaissent aussi les personnes à mobilité réduite, le dépassement de soi grâce aux voyages. Certains en oublient même leur handicap !

Ce séjour au Québec symbolise sans nul doute une avancée dans l’accès à la mobilité internationale pour les jeunes présentant des troubles neurologiques. En effet, sa facilitation est un objectif important pour Ludosens et Regard 9, qui a été défini dans le cadre de leur projet de collaboration.

Benjamin M. (Rédacteur du blog pour les Créatypiques)

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